L’eau et les toilettes à eau (deuxième partie) : les pathogènes et histoire de nos déjections


Les organismes pathogènes

La relation clamée par Pasteur au 19ème siècle entre les microbes et la maladie représente incontestablement l’un des tournants dans notre relation à nos déjections. La peur du microbe, de la bactérie s’installe dans nos esprits sans trop savoir ce qu’il en est. Revenons donc sur ces craintes avec un soupçon d’informations supplémentaires sur nos « crottes » et sur ce qu’elles véhiculent.

A l’œil nu, rien ne sert d’essayer de voir nos agents pathogènes car ils sont à l’échelle microscopique. En effet, notre organisme est constitué de 100 millions de milliards de bactéries. Ces micro-organismes jouent un rôle très important pour la bonne santé de chacun de nous. Certaines bactéries se manifestent lors de la phase de digestion par exemple en synthétisant des vitamines du groupe B et K (bactérie Escherichia coli). Les selles sont constituées de résidus alimentaires et de bactéries vivantes et surtout mortes. Les bactéries représentent 2/3  du poids sec des fèces (M. Archambaud, D. Clave, 2008). Cette flore est essentiellement constituée de bactéries anaérobies.

 

Des petites « anecdotes » sur l’utilisation de nos fèces et urines…

L’urine et les fèces, humaines ou animales, ont toujours eu leurs mots à dire dans notre histoire. Les anecdotes qui suivent permettent d’appréhender sous un autre angle le rapport que certain(e)s entretiennent ou entretenaient avec leurs excréments et urées.

Héritée d’une vieille médecine traditionnelle indienne (Inde), l’urinothérapie, ou amaroli, consiste par exemple à boire en faible dose, diluée dans de l’eau, sa propre urine afin de renforcer son système immunitaire. Il s’agit d’une méthode empirique dont l’efficacité n’a jamais été prouvée scientifiquement mais à laquelle de nombreuses personnes croient partout dans le monde. Christophe Elain rappelle dans son ouvrage qu’au 1er siècle après J.-C., l’urine humaine était utilisée pour soigner la rage. Elle servait aussi à blanchir le linge, pour masser, laver les cheveux, décaper les métaux… Jusqu’en 2005, elle était même prescrite par les laboratoires Wyeth-Ayerst (Canada) un médicament connu sous le nom de Prémarine, dont le principe actif était des œstrogènes (http:// www.emc.fr). Ce traitement (le plus vendu en Amérique du Nord et le troisième médicament le plus vendu au monde) était mis sur le marché pour toutes les femmes ayant des problèmes hormonaux (infertilité due à l’arrivée de la ménopause).

La « crotte » aussi a son lot de péripéties. Pendant longtemps, elle fut le remède à de nombreux maux et blessures. A titre d’exemple, au 19ème siècle en France, on utilisait du crottin de cheval que l’on mélangeait à de la bière pour reprendre de l’énergie. On faisait aussi des cataplasmes à base de selles humaines contre la rage de dent tandis que de l’autre côté de la Manche, on se badigeonnait la tête avec de la fiente de pigeon pour combattre la calvitie (R. H. Guerrand, 1985). Aujourd’hui, les selles d’animaux (surtout la bouse de vache) sont utilisées comme combustible et ce dans des zones où l’accessibilité aux matières carbonées est difficile et où les moyens financiers ne permettent pas d’avoir du gaz ou d’autres sources d’énergies onéreuses. Elle est aussi un matériau de choix pour la construction, que ce soit pour l’édification des murs, le coffrage des sols, le comblement des fissures ou l’imperméabilisation des toitures (Christophe Jean-Damien, thèse vétérinaire, 2000). De même, ces matières excrémentielles sont bien entendu utilisées dans le domaine agricole pour leurs pouvoirs fertilisant.